Parmi les rôles "non-officiels" croisés dans le monde de l’agilité, celui de PPO a pris une place importante dans la réalisation de produits.
BLOG | Comment faire évoluer la maturité d’une organisation ? Et si Kanban avait la réponse
08/10/2024
Une de mes décisions pour 2024 est de continuer d’approfondir mes connaissances dans l’approche Kanban. J’ai débuté ce voyage il y a 2 ans maintenant en suivant les formations Kanban Design System et Kanban Systems Improvement de la Kanban University. Ayant fait découvertes sur découvertes au cours de ces 4 jours, j’étais impatient d’aller encore plus loin.
C’est ce que j’ai fait en assistant à la formation Kanban Maturity Model avec Pierre Leblanc de chez Kanban Québec. Et je n’ai pas été déçu… bien au contraire.
Avant de continuer à vous partager mon aventure, êtes-vous à l’aise avec la notion de flux tiré ? Bon dans le doute, voici une rapide présentation.
La notion de flux tiré vient de chez Toyota et qui est expliquée comme tel : Le système de production Toyota est conçu de manière à « tirer » le produit fini d’un bout à l’autre de la chaine de production.
Si on ramène cette notion dans un contexte IT, cela revient à tirer une carte (ou une story, un sujet, un ticket ou tout autre nom que vous pouvez donner à ce que Kanban appel une carte) par les équipes qui sont en aval d’une chaine de développement. Il vient en opposition à la notion de flux poussée qui revient à pousser un sujet d’une équipe amont à une équipe aval sur cette même chaine.
Après ce bref rappel théorique, nous pouvons revenir à ma formation.
Un outil de maturité d’équipe ou d’organisation ?
Mes attentes à l’égard de cette formation étaient de découvrir en détail un outil de suivi de la maturité d’une équipe Kanban, que j’avais déjà pu survoler lors de la Kanban System Improvement. Quelle ne fut ma surprise lorsque j’ai compris que cet outil n’était pas conçu pour accompagner une équipe, mais bel et bien pour accompagner une organisation dans son ensemble.
Au début de mon exploration de Kanban, mes convictions étaient les mêmes que beaucoup : c’est un outil de management visuel qui aide à donner de la visibilité sur l’activité en cours d’une équipe. Suite à mes deux premières formations, j’ai compris la notion de flux tiré et toute la puissance de la méthode pour améliorer l’efficacité du flux d’une équipe. J’ai donc revu mes convictions : Kanban est une méthode vraiment intéressante pour accompagner une équipe dans une démarche de flux tiré, pour optimiser son efficacité et rentrer dans une démarche d’amélioration continue plus fluide et progressive.
L’outil Kanban Maturity Model (KMM) proposé par la Kanban University était donc pour moi l’outil idéal d’un coach Kanban, pour travailler sur la maturité d’une équipe. En tout cas c’est ce que j’en avais retenu après ce 1er survol. Mais dans la pratique je rencontrais des difficultés à me l’approprier. Contrairement à ce que semblait dire la théorie, la majorité des équipes se trouvait assez rapidement sur les niveaux « Customer-Driven » même si elles n’utilisaient pas toutes les pratiques conseillées par le modèle. D’où mes attentes vis-à-vis de cette nouvelle formation.
Mais dès le début, Pierre, notre formateur, nous parle d’organisation et non d’équipe. J’ai du mal à le suivre.
Puis il compare le KMM avec un playbook de coach sportif, une comparaison qui me parle. Je suis rassuré, on parle bien d’aider une équipe…. Ouf. Puis, contre toute attente (de ma part en tout cas), il nous partage une phrase qui fait tilt dans ma tête : « There is no such thing as bad Kanban, only inappropriate practices adoption » (Il n’y a pas de mauvais Kanban, juste l’utilisation de pratiques inadaptées). Mais c’est bien sûr ! On peut chercher à appliquer toutes les pratiques Agiles qu’on veut avec une équipe, si elle n'est pas dans un environnement adapté, ça ne fonctionnera pas (ou pas aussi bien qu’on le souhaiterait).
Le Kanban Maturity Model est donc là pour nous aider à accompagner l’évolution de la maturité d’une organisation, pour que les équipes en place puissent exprimer leur plein potentiel.
Ça semble tellement évident en l’écrivant que je m’en veux de ne pas l’avoir compris plus tôt. Heureusement pour moi, il n’est jamais trop tard pour apprendre ?).
Assez parler de l’évolution de mes convictions et rentrons dans le vif du sujet.
La maturité d’une organisation, via le prisme de la méthode Kanban.
Dans le Kanban Maturity Model, l’évolution de la maturité d’une organisation se découpe en 7 niveaux allant de 0 à 6 :
- Inconscient / Individualiste : chaque individu sait ce qu’il a à faire et est persuadé qu’on ne peut pas faire autrement.
- Axé équipe : on agit en tant qu’équipe dans le traitement de nos tâches. Nous cherchons à travailler de la meilleure façon possible dans notre écosystème.
- Orienté client : on connaît les clients pour lesquels notre organisation cherche à générer de la valeur et sa satisfaction est notre priorité.
- Adapté à la raison d’être : il n’y a pas de héros mais des processus qui sont maîtrisés.
Nos clients sont toujours satisfaits. - Couverture des risques : tout le monde est satisfait (collaborateur, manager ET clients).
Il n’y a plus de surprise. - Leader de son marché : recherche de perfectionnement pour être le n°1 du marché.
- Adapté à la réalité pour survivre : capable de se réadapter instinctivement pour répondre à l’évolution du marché.
Aujourd’hui, l’expérience du terrain montre que beaucoup d’organisations sont au niveau 1 voire 2, là où elles pensent se trouver au niveau 3 ou 4. On trouve quelques exceptions qui sont déjà au niveau 5 voire 6 (Apple et Google par exemple).
Tout le modèle de Kanban est là pour proposer des pratiques qui peuvent aider l’organisation à :
- Consolider son niveau actuel.
- Atteindre un niveau supérieur.
L’approche est intéressante, car en consultant les pratiques de chaque niveau, on peut observer celles qui existent dans l’organisation, évaluer le niveau de maturité actuel et donc envisager les possibilités d’évolutions vers le niveau suivant. Mais si le modèle s’arrêtait à cela, il sonnerait un peu creux à mon goût. Là où je le trouve pertinent, c’est qu’il rattache les pratiques à la culture et aux résultats souhaités.
Les 3 piliers de KMM
Il est, de nos jours, fréquent pour une entreprise de travailler en interne pour définir la culture et les valeurs qui la représentent. On les retrouve souvent mises en avant sur leur site corporate. Ces valeurs ne sont pas choisies au hasard. Elles sont là pour obtenir des résultats précis au travers de la production de l’entreprise. Il est donc logique de déployer sur le terrain des pratiques qui permettent de faire le lien. Mais est-ce toujours le cas ? Une entreprise qui prône l’intelligence collective auprès de ses clients afin d’être force de proposition, organise-t-elle régulièrement des ateliers collaboratifs avec ses propres équipes ? Il serait au moins intéressant de se poser la question.
Et si ce n’est pas le cas, que pouvons-nous faire ?
- Identifier les piliers qui ne correspondent pas à ce que l’entreprise souhaite favoriser.
- S’assurer que ce que l’on souhaite n’est pas trop loin de la réalité. En effet, si on cherche à opérer un changement trop brutal des pratiques, cela risque de créer un choc culturel dans l’entreprise qui sera mal vécu (l’évolution culturelle d’une entreprise pourrait faire l’objet d’un article à part entière !).
Le KMM offre énormément de pistes au travers de plus de 500 pages et il existe également en ligne https://kanban.plus/. Lorsqu’on le consulte, surtout dans sa version papier, on comprend mieux l’image du « playbook » utilisé en comparaison par Pierre Leblanc.
Pour chaque recherche d’alignement des piliers, nous trouverons la pratique qui peut nous aider et pour la mettre en place, nous construirons notre « potion » en suivant la recette proposée par Kanban :
- Identifier le Stressor : cet élément qui va créer un changement dans les pratiques. Typiquement une nouvelle pratique Kanban qu’on trouve dans les étapes de transition entre chaque niveau de maturité.
- Créer un moment d’observation : comment les choses se sont passées suite à la mise en place de ce petit changement ? Qu’observe-t-on ? Comment l’avons-nous vécu ?
- Générer du leadership : s’appuyer sur cette expérience pour identifier les actions d’amélioration continue. Et tout le monde peut prendre en charge des actions ?.
Le mot de la fin
L’approche de Kanban sur l’évolution de la maturité de nos organisations va bien entendu beaucoup plus loin. J’espère juste qu’avec ces quelques lignes de partage de ma vision, cela vous donnera envie de creuser le sujet.
En tout cas, moi, je vais le garder sous le coude lors de toutes mes missions. Je suis convaincu que c’est un outil qui apporte des pistes d’améliorations pour toute organisation qui souhaite passer d’un flux poussé à un flux tiré. Et pourquoi pas même aller jusqu’à un flux continu… même dans le monde IT. Mais là, c’est un autre sujet.
N’hésitez pas à prendre quelques minutes à la suite de cette lecture pour vous demander si la culture de votre organisation est en adéquation avec ses pratiques. Et si tout cela est bien aligné pour obtenir les résultats souhaités. Non ? Reste plus qu’à trouver votre « potion ».
Voici en une image le KMM pour vous faire une idée.